Bethesda, autrefois synonyme de jeux de rôle immersifs et ambitieux, a longtemps été une référence dans l'industrie du jeu vidéo. Des titres comme The Elder Scrolls V: Skyrim ou Fallout: New Vegas (bien que développé par Obsidian, il utilisait la technologie de Bethesda) ont marqué les esprits grâce à leur univers vaste, leurs quêtes mémorables et leur liberté d’action exceptionnelle.
Cependant, depuis plusieurs années, la réputation du studio s’est lentement érodée. Des jeux comme Fallout 4, Fallout 76 et plus récemment Starfield ont suscité des critiques de plus en plus vives, accusant Bethesda de stagner, voire de régresser sur plusieurs aspects essentiels. Mondes de plus en plus vides, gameplay en perte de profondeur, dialogues artificiels et un moteur de jeu dépassé, autant de reproches qui reviennent fréquemment parmi les joueurs et les critiques.
Alors, qu’est-ce qui a causé ce déclin progressif ? Pourquoi Bethesda semble-t-il s’éloigner de ce qui faisait son succès autrefois ? Et surtout, y a-t-il encore un espoir avec The Elder Scrolls 6 ? C’est ce que nous allons analyser en détail.
Une immersion en déclin malgré des graphismes en hausse
Des mondes plus beaux mais plus vides
Il est indéniable que Bethesda a fait des progrès en matière de graphismes. Chaque nouvelle génération de jeux apporte des environnements plus détaillés, des effets de lumière améliorés et une meilleure modélisation des personnages. Starfield, par exemple, affiche des paysages stellaires impressionnants et des villes riches en détails.
Mais ce gain visuel s’accompagne paradoxalement d’une perte d’immersion. Là où Morrowind ou Skyrim débordaient de vie avec des villes animées et des personnages uniques, les derniers jeux du studio souffrent d’un problème récurrent: le gigantisme au détriment du contenu. Les mondes sont plus vastes que jamais, mais aussi plus vides. Beaucoup de lieux manquent de personnalité et ne proposent que peu d’interactions réellement engageantes. Fallout 4 et Starfield ont souvent été critiqués pour leurs nombreux espaces ouverts qui, au final, ne servent qu’à rallonger artificiellement l'exploration.
Là où Skyrim pouvait surprendre avec une grotte renfermant une histoire cachée ou un événement inattendu, Starfield propose trop souvent des planètes vides où l'exploration se résume à marcher sans but.
Des dialogues qui donnent l'illusion du choix
Autre point clé qui a terni l’immersion des jeux Bethesda: les dialogues. À une époque, le studio brillait par la richesse de ses interactions. Morrowind et Oblivion permettaient des échanges approfondis, où les réponses du joueur influençaient réellement le déroulement des quêtes.
Mais depuis Fallout 4, les dialogues se sont appauvris. On retrouve souvent quatre options de réponse qui, en réalité, mènent toutes au même résultat. L’illusion du choix est flagrante et nuit à l’implication du joueur. Un système encore plus limité dans Starfield, où les conversations manquent de naturel et peinent à donner le sentiment que le joueur a un véritable impact sur le monde qui l'entoure.
Bethesda semble avoir perdu une partie de son talent pour la narration interactive. Là où d’autres studios, comme CD Projekt Red avec The Witcher 3, ont réussi à donner du poids aux choix du joueur, Bethesda semble s’enliser dans des mécaniques vieillissantes et prévisibles.
Une expérience de jeu plombée par des bugs et un moteur vieillissant
Un moteur qui accuse son âge
L’un des plus gros reproches faits à Bethesda concerne son moteur de jeu, le Creation Engine. Basé sur le Gamebryo Engine utilisé depuis Morrowind (2002), il a été maintes fois amélioré, mais ses limites deviennent de plus en plus évidentes. Si les jeux Bethesda ont toujours eu une certaine "rigidité" dans leurs animations et leur physique, ces défauts sont devenus encore plus flagrants à mesure que l'industrie évolue.
Malgré des ajustements apportés au moteur pour Fallout 4, Fallout 76 et Starfield, les mêmes problèmes persistent:
- Animations rigides et expressions faciales datées par rapport aux standards actuels.
- IA des PNJ souvent incohérente, rendant certaines interactions absurdes.
- Systèmes de collision mal gérés, où les objets et personnages peuvent traverser le décor.
Le studio continue pourtant de s'accrocher à ce moteur, préférant l’améliorer plutôt que d’en adopter un nouveau. Résultat: une technologie obsolète qui freine l’évolution du gameplay et de l’immersion. Là où des studios comme Guerrilla Games (Horizon), Rockstar (Red Dead Redemption 2) ou CD Projekt Red (Cyberpunk 2077, après sa refonte) adoptent des moteurs modernes et performants, Bethesda semble coincé dans une boucle de limitations techniques.
Un recyclage des fonctionnalités sans réelle innovation
Autre problème majeur: le recyclage constant de mécaniques de gameplay, souvent simplifiées au fil des années. Prenons quelques exemples concrets:
- Le système de dialogue est passé de textes complexes et profonds (Morrowind) à un menu de choix restreint et superficiel (Fallout 4, Starfield).
- Le système de compétences et de progression a perdu en profondeur. Là où Oblivion ou Fallout: New Vegas proposaient une vraie construction de personnage avec des spécialisations poussées, les derniers jeux de Bethesda privilégient une montée en puissance plus générique et moins impactante.
- Les mêmes mécaniques de crafting, de housing et d’exploration sont réutilisées à l’identique, souvent avec des fonctionnalités amputées. Le logement et la personnalisation de base dans Fallout 4 ont par exemple été repris dans Starfield, mais avec des restrictions plus frustrantes qu'autre chose.
Bethesda introduit certes de nouvelles fonctionnalités, mais celles-ci ont rarement un véritable impact sur l'expérience de jeu. Par exemple, Starfield permet de créer et piloter son propre vaisseau, mais l’exploration spatiale reste limitée par des écrans de chargement et une gestion rigide des déplacements. Loin d’être une révolution, cette mécanique donne davantage une impression de "gadget" qu’un réel changement de paradigme.
En voulant conserver son identité tout en tentant d’innover, Bethesda semble ne jamais aller assez loin dans la modernisation de son gameplay, donnant un goût de déjà-vu à chaque nouveau titre.
Des mécaniques de jeu moins travaillées
Des quêtes génériques et sans profondeur
Les quêtes ont toujours été un élément clé des RPG de Bethesda. Qui ne se souvient pas des guildes dans Oblivion, des factions de Skyrim ou des choix moraux marquants dans Fallout: New Vegas ? Pourtant, depuis quelques années, les quêtes sont devenues de plus en plus génériques et prévisibles.
Dans Fallout 4 et Starfield, on retrouve de nombreuses missions basées sur des allers-retours répétitifs et sans réel impact narratif. La plupart des quêtes secondaires se résument à:
- Aller à un point A, tuer un ennemi ou récupérer un objet, puis revenir au point B.
- Effectuer une mission générique pour une faction sans véritable développement scénaristique.
- Suivre une trame principale qui manque de choix véritablement significatifs.
Là où Skyrim ou Morrowind proposaient des histoires intrigantes et bien écrites, les dernières productions du studio donnent parfois l’impression d’être générées de manière procédurale, sans grande attention aux détails. Le sentiment d'implication du joueur s'efface, rendant les quêtes moins mémorables et motivantes.
Des ajouts de gameplay qui manquent d’impact
Bethesda essaie régulièrement d’ajouter de nouvelles mécaniques de jeu, mais celles-ci s’avèrent souvent superficielles et peu influentes sur l’expérience globale.
Quelques exemples récents:
- Le pilotage de vaisseaux dans Starfield: une idée séduisante sur le papier, mais qui se transforme en une succession de menus et de chargements, empêchant toute vraie sensation de voyage interstellaire.
- Les bases à construire dans Fallout 4 et Starfield: un système qui a du potentiel, mais qui finit par être un simple "mini-jeu" plutôt qu’une réelle extension du gameplay.
- L’amélioration des armes et équipements: un système trop simplifié, où les décisions sont souvent évidentes et sans réel impact stratégique.
Contrairement à des studios comme Larian (Baldur’s Gate 3) ou FromSoftware (Elden Ring), qui ajoutent des mécaniques profondes et bien intégrées, Bethesda semble introduire des fonctionnalités sans réellement les exploiter à fond. L’innovation existe, mais elle manque de finition et d'impact réel sur le plaisir de jeu.
Trop de cloisonnement dans l’exploration
Une structure en "boîte" qui casse l’immersion
L’un des plaisirs majeurs des jeux Bethesda a toujours été l’exploration libre. Dans Morrowind ou Skyrim, on pouvait voyager sans interruption, découvrir des lieux cachés et s’immerger pleinement dans le monde du jeu. Mais ces dernières années, Bethesda semble s’éloigner de cette philosophie, au point que son level design donne une sensation de cloisonnement très frustrante.
Dans Starfield, ce problème est particulièrement flagrant. Plutôt que de proposer une véritable exploration spatiale fluide, Bethesda a opté pour un découpage en zones séparées par des écrans de chargement constants. Ainsi, pour passer d’une ville à l’espace, il faut:
- Ouvrir un menu pour sélectionner une destination.
- Regarder un écran de chargement avant d’arriver en orbite.
- Re-sélectionner un autre point pour atterrir.
- Encore un écran de chargement avant d’explorer une surface planétaire.
Ce système casse complètement l’illusion de voyage et rappelle plus une suite de niveaux indépendants qu’un monde réellement ouvert et connecté.
Dans Fallout 4 et Fallout 76, on retrouvait aussi ce problème avec des bâtiments et des zones séparés par des temps de chargement, empêchant une exploration fluide et continue comme dans un Red Dead Redemption 2 ou un Elden Ring. Cette découpage excessif rend le monde moins organique et donne l’impression de naviguer entre des "boîtes" de gameplay au lieu d’un univers réellement vivant.
Des temps de chargement omniprésents
Le cloisonnement de l’exploration est d’autant plus frustrant que les temps de chargement sont omniprésents, même sur des machines modernes.
Alors que d’autres studios exploitent les SSD des consoles et PC récents pour offrir des transitions fluides et des mondes sans coupures, Bethesda peine à s’affranchir de ses vieilles habitudes. Dans Skyrim, les temps de chargement entre intérieurs et extérieurs étaient déjà présents, mais ils étaient moins fréquents et plus justifiables à l’époque.
Aujourd’hui, alors que des jeux comme Cyberpunk 2077 ou The Witcher 3 permettent d’entrer et sortir des bâtiments sans aucune coupure, Bethesda reste figé dans une approche archaïque qui nuit énormément à l’immersion.
Ce découpage excessif donne un goût de "monde modulaire" plutôt qu’un véritable univers organique, une direction qui frustre de nombreux joueurs en quête d’aventure et de fluidité.
Elder Scrolls 6: l’espoir d’un renouveau ?
Peut-on encore croire en Bethesda ?
Malgré les critiques grandissantes à l’égard du studio, Elder Scrolls 6 reste un titre extrêmement attendu. Après tout, Bethesda a déjà prouvé qu’il était capable de créer des mondes ouverts riches et captivants. Mais la question qui se pose aujourd’hui est: le studio a-t-il appris de ses erreurs ?
Todd Howard et son équipe ont promis une refonte du moteur de jeu avec le "Creation Engine 2", censé apporter une meilleure gestion des animations, des environnements plus dynamiques et des temps de chargement réduits. Cependant, ces promesses ont déjà été faites par le passé et l’expérience récente avec Starfield a laissé de nombreux joueurs sceptiques.
La principale inquiétude vient du risque de stagnation: Bethesda va-t-il réellement innover ou se contenter d’un Skyrim 2.0 avec de meilleurs graphismes ? Pour éviter une nouvelle déception, le studio devra absolument:
- Améliorer l’écriture et l’impact des choix dans les dialogues.
- Rendre les quêtes plus travaillées et moins génériques.
- Éviter un monde trop cloisonné et garantir une exploration fluide.
- Moderniser son IA et son gameplay pour se mettre au niveau des standards actuels.
Ce que les fans attendent pour un retour en force
Les joueurs de The Elder Scrolls sont passionnés et savent exactement ce qu’ils veulent pour ce nouvel opus. Les attentes principales se résument à quelques points clés:
- Un vrai monde ouvert vivant et interactif, où chaque ville, village et grotte a une identité propre et des événements dynamiques.
- Un retour à une progression de personnage plus complexe, avec des choix de compétences plus stratégiques et variés.
- Des factions et guildes avec des intrigues profondes et ramifiées, où le joueur peut réellement influencer le monde.
- Moins de cloisonnement et plus de liberté d’exploration, en supprimant au maximum les coupures et les zones artificielles.
- Un moteur graphique et physique à la hauteur des standards actuels, pour éviter l’effet "jeu daté à sa sortie".
Si Bethesda parvient à cocher ces cases, Elder Scrolls 6 pourrait bien marquer un véritable renouveau pour le studio. Mais si l’on retrouve les mêmes erreurs que dans Fallout 4 et Starfield, alors l’avenir de Bethesda risque d’être plus incertain que jamais.
En quelques mots
Bethesda reste un studio emblématique, mais son évolution ces dernières années a soulevé de nombreuses critiques. Mondes plus vides, dialogues artificiels, mécaniques de jeu de plus en plus simplifiées et un moteur vieillissant: autant d’éléments qui ont terni son image auprès des joueurs.
Si des jeux comme Skyrim et Fallout: New Vegas (développé par Obsidian mais sur la base de Bethesda) sont encore adulés aujourd’hui, c’est parce qu’ils offraient une immersion profonde, des choix significatifs et une vraie liberté d’action. Malheureusement, cette philosophie semble s’être diluée avec le temps, remplacée par des mondes plus beaux mais moins vivants et interactifs.
Avec Elder Scrolls 6, Bethesda a une dernière chance de prouver qu’il peut encore être un studio visionnaire. Si le jeu parvient à moderniser ses mécaniques tout en restant fidèle à ce qui faisait la force de la série, il pourrait marquer un véritable tournant. Mais si les mêmes erreurs persistent, alors Bethesda risque de perdre définitivement la confiance de sa communauté.
L’avenir nous dira si le studio saura se réinventer… ou s’il restera figé dans ses vieilles habitudes.