Quand Monster Hunter Wilds a été annoncé, l’enthousiasme des fans ne s’est pas fait attendre. Capcom, fort du succès fulgurant de Monster Hunter World, avait promis une expérience encore plus immersive, avec un monde ouvert dynamique et une faune plus réaliste que jamais. Le lancement du jeu a tenu ses promesses: plus de 10 millions d’exemplaires écoulés en un temps record. Un démarrage tonitruant qui laissait présager une domination commerciale durable.
Mais derrière cette réussite initiale se cache une réalité plus nuancée. Très vite, les courbes de ventes se sont infléchies, au point de provoquer un véritable questionnement au sein de l’éditeur japonais. Qu’est-ce qui a freiné la croissance de Monster Hunter Wilds ? Pourquoi, malgré des critiques positives et une base de fans fidèles, les ventes ont-elles stagné ?
C’est Haruhiro Tsujimoto, président de Capcom, qui a mis le doigt sur une cause pour le moins inattendue… ou pas tant que ça: la PlayStation 5 elle-même, qu’il qualifie de « barrière » pour les joueurs, à cause de son prix. Une déclaration qui a fait l’effet d’un coup de tonnerre dans l’industrie, et qui soulève des questions profondes sur l’accessibilité du jeu vidéo aujourd’hui.
Un lancement record suivi d’un ralentissement brutal
8 millions vendus en trois jours, succès immédiat
Le lancement de Monster Hunter Wilds a frisé l’exceptionnel. En à peine trois jours, Capcom annonçait fièrement avoir distribué plus de 8 millions d’exemplaires à travers le monde. Ce chiffre, en phase avec les records précédents de la franchise, témoignait d’un engouement intact pour la chasse aux monstres. Ce départ en trombe a été facilité par une stratégie marketing agressive, une fanbase bien ancrée et un bouche-à-oreille très positif dès les premières heures de jeu.
Le titre bénéficiait également de la puissance des consoles nouvelle génération, en particulier la PS5, qui proposait une fluidité et des graphismes époustouflants. Un argument de poids pour séduire les joueurs en quête d’un AAA immersif et ambitieux.
Des ventes qui chutent à 477 000 unités entre le 1ᵉʳ avril et le 30 juin 2025
Mais alors que l’élan initial semblait irrésistible, un ralentissement spectaculaire est venu doucher les espoirs. Entre avril et juin 2025, seulement 477 000 exemplaires supplémentaires se sont vendus. Une stagnation qui tranche avec les chiffres initiaux et qui interroge, d’autant plus que le jeu a continué de recevoir des mises à jour régulières et du contenu post-lancement de qualité.
"Un jeu qui s’écoule à 10 millions d’exemplaires et qui ralentit aussi brusquement, c’est un signal que quelque chose coince ailleurs que dans le jeu lui-même."
Cette chute pose une question essentielle: qu’est-ce qui a pu bloquer l’expansion naturelle du titre ? Selon Capcom, ce ne serait ni un problème de qualité, ni de communication, mais bien une barrière économique d’ordre matériel: le prix d’entrée dans l’écosystème PlayStation.
Le « barrier PS5 » selon Haruhiro Tsujimoto
Les propos du président de Capcom sur le prix élevé de la PS5
Dans une interview accordée récemment, Haruhiro Tsujimoto, président de Capcom, a mis en lumière un obstacle majeur à la croissance des ventes de Monster Hunter Wilds: le coût d’acquisition d’une console PlayStation 5. Un point rarement évoqué aussi frontalement par un acteur majeur de l’industrie.
« Toutefois, nous avons également constaté que la "barrière PS5" est étonnamment élevée. La console coûte environ 80 000 yens. Si l'on ajoute le coût des jeux et des abonnements mensuels, on arrive à environ 100 000 yens au moment de l'achat. »
Tsujimoto ne se contente pas de pointer un problème local. Il souligne que cette barrière économique n’est pas propre au marché japonais, mais se répète aussi dans les autres régions du monde. La PS5, malgré ses performances et sa popularité, demeure une dépense conséquente, surtout pour les jeunes joueurs, principal public cible de la série Monster Hunter.
Choc des consoles : la PS5 (~ 80 000 yen) vs la Switch 2 (~ 49 980 yen)
La comparaison avec la Switch 2 est révélatrice. Alors que la console de Sony atteint un prix d’environ 80 000 yens (plus de 500 euros), la nouvelle console de Nintendo se positionne sous la barre des 50 000 yens, soit environ 300 euros. La différence est significative, surtout dans un contexte économique global où les consommateurs sont plus sensibles aux dépenses de loisir.
De plus, la Switch 2 a déjà conquis une large part de marché, grâce à sa politique tarifaire plus abordable et à son écosystème plus accessible. Ce qui, mécaniquement, oriente les jeunes joueurs — souvent à budget limité — vers cette plateforme. Pour Capcom, cela crée une dichotomie entre le public ciblé et le support principal de Monster Hunter Wilds.
"La PlayStation est une vitrine technologique. Mais quand le prix d’entrée freine l'accès à vos plus grandes licences, il est peut-être temps de revoir sa stratégie."
Conséquences commerciales et réponses de Capcom
Impact sur les ventes globales et sur l’action de Capcom
Le ralentissement des ventes de Monster Hunter Wilds n’est pas sans répercussions pour Capcom. Malgré un démarrage exceptionnel, l’entreprise a vu ses projections de croissance révisées à la baisse pour le deuxième trimestre de l’année fiscale 2025. L’action Capcom, bien que toujours stable à long terme, a subi une légère chute à l’annonce des résultats. Pour un titre aussi stratégique, cette stagnation des ventes est un coup dur à encaisser.
Le jeu, pourtant très bien reçu par la critique et les joueurs, se retrouve coincé entre la qualité de l’offre et l’accessibilité du matériel nécessaire pour y jouer. Un paradoxe que Capcom n’avait peut-être pas anticipé à cette échelle.
Actions entreprises: mises à jour, promotions, stratégie à venir
Face à cette situation, Capcom ne reste pas les bras croisés. L’éditeur a renforcé ses campagnes de communication autour des futures mises à jour du jeu, ajoutant de nouveaux monstres, des événements saisonniers, et des bonus de connexion quotidiens pour maintenir l’engagement des joueurs existants.
En parallèle, plusieurs promotions ciblées ont été lancées sur le PlayStation Store, visant à relancer les ventes digitales. On note également une collaboration accrue avec Sony pour mieux positionner Monster Hunter Wilds lors des événements comme le Tokyo Game Show ou le PlayStation Showcase.
Enfin, Haruhiro Tsujimoto a laissé entendre qu’une stratégie multiplateforme pourrait devenir incontournable à l’avenir, dans l’objectif de réduire la dépendance à une seule console haut de gamme.
« Si les joueurs ne viennent pas à nous à cause du prix, alors c’est peut-être à nous d’aller vers eux, sur les plateformes qu’ils peuvent se permettre. »
Perspectives: vers un portage sur Switch 2 et au-delà ?
L’idée d’un portage sur Switch 2 évoquée comme solution pour élargir l’audience
Face à la « barrière PS5 », Capcom semble prêt à revoir sa copie en matière de stratégie de déploiement. Lors de son interview, Haruhiro Tsujimoto a évoqué une piste de réflexion qui pourrait bien rebattre les cartes: un potentiel portage de Monster Hunter Wilds sur la Nintendo Switch 2. Rien d’annoncé officiellement pour l’instant, mais les mots du président sont lourds de sens.
La Switch 2, déjà largement adoptée, offre un double avantage: une base installée massive et un prix plus accessible. Deux arguments de poids pour un jeu dont le public est historiquement très fort chez Nintendo, notamment grâce au succès de Monster Hunter Rise. Capcom connaît bien cette audience, et un retour sur console Nintendo serait aussi une manière de renouer avec une communauté attachée au format hybride.
Enjeux financiers et accès au jeu pour les jeunes générations
Outre l’aspect stratégique, ce possible portage soulève une problématique plus large: celle de l’accessibilité économique des jeux AAA. Tsujimoto l’a bien souligné: les jeunes générations, cœur de cible de Monster Hunter, peinent à justifier une dépense initiale de 100 000 yens pour accéder à un seul titre. Un chiffre qui inclut la console, le jeu, et parfois l’abonnement multijoueur.
Un portage sur Switch 2 — ou toute autre plateforme plus abordable — permettrait non seulement de relancer les ventes de Wilds, mais aussi de donner à Capcom un levier de croissance durable dans un marché de plus en plus segmenté par les écarts de pouvoir d’achat.
« Ce n’est pas une question de puissance brute, mais de rendre le jeu accessible à ceux qui veulent y jouer. »
Capcom semble avoir entendu ce message, et tout indique qu’un élargissement des supports sera, à terme, une étape inévitable pour assurer la longévité de la franchise.
En quelques mots
Le cas Monster Hunter Wilds illustre parfaitement une tension de plus en plus palpable dans l’industrie du jeu vidéo: la qualité d’un jeu ne suffit plus à garantir son succès commercial. Malgré un lancement éclatant et des critiques élogieuses, le dernier opus de Capcom a vu ses ventes s’essouffler rapidement, non pas par désintérêt, mais à cause d’un obstacle économique bien réel: le prix d’entrée dans l’écosystème PS5.
Haruhiro Tsujimoto, en pointant du doigt cette « barrière », ne remet pas en cause la qualité de la console, mais alerte sur un décalage entre les ambitions des éditeurs et les réalités du marché. Avec la Switch 2 qui séduit par son tarif plus accessible, l’idée d’un portage sur cette plateforme semble être une réponse logique et attendue.
En diversifiant ses supports et en s’adaptant à la réalité financière des joueurs, Capcom pourrait transformer cette déconvenue en opportunité stratégique. Une leçon qui ne concerne pas seulement Monster Hunter, mais l’ensemble des éditeurs qui misent tout sur une ou deux plateformes haut de gamme.
L’avenir de Monster Hunter Wilds ne se jouera peut-être pas sur la puissance graphique, mais sur la capacité de Capcom à toucher tous les chasseurs, où qu’ils soient.
