Judas: le successeur de BioShock toujours introuvable à l’approche de 2025

AuteurArticle écrit par Allan Tylisz
|
date de publication05/05/2025
Scène immersive en vue subjective tirée de l’univers du jeu vidéo BioShock, où un personnage observe sa propre main gauche enflammée par une substance surnaturelle appelée plasmide. Une boule d’énergie violette entourée de flammes orange jaillit de sa paume, illuminant les alentours avec une lumière chaude et inquiétante. L’environnement est un intérieur délabré, typique de la ville sous-marine dystopique de Rapture : murs en bois vieilli, sol en parquet usé, vitres brisées, tuyauterie rouillée et lavabo ancien. À droite, une affiche rétro au style propagandiste montre une femme mangeant avec voracité des spaghettis, accompagnée du mot "ENTITLED" en haut et du slogan "BE GRATEFUL FOR WHAT'S GIVEN TO YOU" en bas, renforçant l’atmosphère satirique et critique de la société de consommation dans le jeu. L’éclairage dramatique et les couleurs saturées accentuent le ton glauque et surnaturel de la scène, emblématique de l’identité visuelle de BioShock.

Lorsque Ghost Story Games a dévoilé Judas en décembre 2022, l’annonce a fait l’effet d’une bombe dans l’industrie du jeu vidéo. Et pour cause: ce nouveau FPS narratif est dirigé par nul autre que Ken Levine, le génie créatif derrière BioShock et BioShock Infinite. Présenté comme une « suite spirituelle » des deux titres cultes, Judas promettait une aventure immersive, à mi-chemin entre introspection et chaos dystopique.

Ce titre ambitieux était initialement prévu pour une sortie au plus tard en mars 2025, selon les déclarations de Strauss Zelnick, PDG de Take-Two Interactive. Cependant, à l’heure actuelle, le jeu n’est toujours pas disponible, et le silence autour de son développement inquiète autant qu’il intrigue. Les dernières nouvelles officielles remontent à mars 2024, depuis, plus rien: ni trailer, ni annonce, ni mise à jour. Un paradoxe étrange pour un jeu aussi attendu.

Dans cet article, nous allons explorer les causes probables de ce silence prolongé, les difficultés que rencontre le projet, mais aussi ce que cela implique pour l’avenir de Judas, un titre qui pourrait soit marquer une révolution narrative dans le jeu vidéo… soit s’effondrer sous le poids de ses propres ambitions.

 

Le silence radio autour de Judas

Une communication quasi inexistante

Depuis sa première bande-annonce intrigante diffusée lors des Game Awards 2022, Judas semble s’être évaporé dans les limbes de l’industrie vidéoludique. Alors que les titres concurrents multiplient les teasers, démonstrations techniques et interviews développeurs, Ghost Story Games, lui, reste désespérément muet. Aucune nouvelle information n’a été diffusée depuis mars 2024, et la page officielle du jeu comme les réseaux sociaux liés au studio n’ont plus été mis à jour.

Ce mutisme est d’autant plus surprenant qu’un jeu de cette envergure devrait normalement alimenter régulièrement la curiosité de son public. Les périodes de silence médiatique ne sont pas rares dans l'industrie, mais à l’approche d’une date théorique de sortie, ce calme absolu devient presque inquiétant.

"J’ai l’impression que Judas va finir comme Dead Island 2, une arlésienne qui mettra dix ans à sortir"
– commentaire d’un utilisateur sur Reddit

Réactions de la communauté

Ce vide informationnel a, sans surprise, nourri toutes les spéculations. Sur Reddit, Twitter, ou encore les forums spécialisés comme ResetEra, les fans échangent rumeurs et hypothèses. Certains évoquent une sortie surprise lors d’un futur événement comme le Summer Game Fest 2025, d’autres prédisent un report silencieux, voire une annulation.

Certains joueurs s’inquiètent aussi du manque de transparence de la part de Ghost Story Games, estimant qu’une telle opacité nuit à la réputation du projet. Ce flou alimente aussi les peurs concernant la santé financière ou organisationnelle du studio, un sujet qui prendra d’ailleurs toute son importance dans la section suivante.

 

Un développement tumultueux

Les révélations de Jason Schreier

L’enthousiasme suscité par l’annonce de Judas a rapidement été tempéré par des révélations inquiétantes sur les coulisses de son développement. En 2022, le journaliste Jason Schreier de Bloomberg a publié une enquête décrivant un véritable “enfer de production” chez Ghost Story Games. Selon plusieurs sources internes, le studio serait miné par une organisation chaotique et un style de gestion autoritaire incarné par Ken Levine lui-même.

Ce dernier, salué pour sa créativité, serait également un perfectionniste intransigeant, capable de changer brutalement de direction en plein développement. Un ancien employé a comparé travailler avec lui à "naviguer dans une tempête constante d’idées brillantes mais impossibles à mettre en œuvre". Résultat: une multitude de refontes, de pivots conceptuels et de pertes de temps, engendrant frustration et fatigue au sein des équipes.

"Il veut tout contrôler, tout écrire, tout revoir. Mais dans ces conditions, on avance jamais."
– témoignage anonyme d’un ex-développeur dans l’enquête de Bloomberg

Conséquences sur le projet

Les répercussions sont évidentes: de nombreux membres de l’équipe ont quitté le navire au fil des années, épuisés par les conditions de travail. Cette instabilité des effectifs aurait ralenti le développement à plusieurs reprises, certains systèmes ayant été reconstruits depuis zéro à cause de changements de direction soudains.

La complexité du projet n’a rien arrangé. Judas ambitionne de proposer une narration interactive dynamique, où les choix du joueur influencent profondément le déroulement de l’histoire. Ce concept, bien que séduisant sur le papier, s’est révélé extrêmement difficile à concrétiser, surtout dans un contexte de management aussi instable.

Aujourd’hui, si l’on ignore dans quel état se trouve réellement le développement, tout indique qu’il a été long et chaotique, bien loin d’un processus fluide et maîtrisé.

 

Judas: un concept ambitieux mais risqué

L’héritage de BioShock

Lorsqu’un jeu est développé par le créateur de BioShock, les attentes explosent naturellement. Cette franchise culte a laissé une empreinte durable dans l’univers vidéoludique, grâce à son esthétique unique, sa narration sophistiquée et son gameplay hybride. Judas se présente donc comme une succession spirituelle, un projet qui entend puiser dans les codes de son aîné tout en s’en affranchissant par l’innovation.

Le trailer initial dévoilait une ambiance rétro-futuriste, des environnements cloisonnés à l’esthétique art déco et des ennemis visuellement marquants — autant d’éléments qui rappellent Rapture ou Columbia. Mais derrière ce vernis familier, Judas cherche à redéfinir la formule. Ken Levine a plusieurs fois évoqué sa volonté de créer une expérience narrative modulable, où le joueur influencerait profondément les événements à travers ses actions et ses alliances.

Innovations annoncées

L’un des aspects les plus fascinants du projet réside dans l’introduction d’un système narratif inspiré du “Nemesis System” de Middle-earth: Shadow of Mordor. Concrètement, cela signifie que les personnages rencontrés pourraient se souvenir des actions du joueur, et ajuster leur comportement en conséquence. Un mécanisme qui permettrait de façonner une histoire unique à chaque partie, tout en augmentant la rejouabilité.

Le gameplay devrait également mélanger exploration, action intense, choix moraux complexes, et sans doute quelques éléments RPG. Cependant, ces ambitions techniques et narratives posent une question cruciale: sont-elles réalistes dans les conditions de développement actuelles ? Lorsque l’on combine innovation de rupture et instabilité organisationnelle, le résultat peut être à double tranchant.

Si Judas parvient à tenir ses promesses, il pourrait bien marquer une étape décisive dans l’évolution du jeu narratif. Mais si l'exécution ne suit pas, il risque de devenir un cas d’école d’ambition non maîtrisée.

 

Quelles perspectives pour Judas ?

Une sortie en 2025 encore possible ?

Malgré l’absence de communication officielle depuis plus d’un an, le jeu Judas n’a pas été formellement repoussé ni annulé. Les propos de Strauss Zelnick, affirmant en février 2023 que la sortie aurait lieu « d’ici mars 2025 », n’ont jamais été contredits. Pourtant, à mesure que cette échéance approche, le doute s’installe.

Aucune date de sortie n’a été réaffirmée, aucun événement majeur n’a mis Judas en avant, et aucun signe ne laisse présager d’une phase de finalisation. Cela n’a pas empêché certains observateurs de spéculer sur un lancement surprise, une méthode de communication adoptée par certains éditeurs pour créer l’événement. Toutefois, au vu de la complexité supposée du développement, une telle stratégie paraît peu probable.

Si le jeu sort bien en 2025, il est probable qu’il le fasse dans la précipitation ou en l’état, ce qui pourrait nuire à son potentiel critique. À l’inverse, un report officiellement assumé permettrait peut-être de rassurer la communauté sur la qualité finale du projet.

Impact sur la réputation de Ken Levine

Ken Levine, en tant que figure emblématique du jeu vidéo narratif, joue gros avec Judas. Ce projet est son premier depuis la dissolution d’Irrational Games, et il symbolise une tentative de renaissance créative sous sa propre bannière. Mais les critiques sur sa gestion, les rumeurs de perfectionnisme toxique, et les retards répétés pourraient gravement entacher sa réputation.

Dans une industrie qui évolue rapidement, un projet long et incertain peut vite être perçu comme un fossile d’ambition mal maîtrisée. Si Judas déçoit, il ne fera pas que ternir le nom de son créateur: il pourrait aussi décourager les investisseurs à soutenir des visions trop individualistes et complexes.

Tout dépendra désormais de la capacité de Ghost Story Games à réengager son public et à prouver que ce long silence n’était pas synonyme d’échec, mais de préparation minutieuse.

 


En quelques mots

Judas devait être un tournant, un manifeste vidéoludique signé Ken Levine, qui conjuguerait l’héritage de BioShock à des innovations narratives audacieuses. Pourtant, deux ans après son annonce, le jeu reste enveloppé dans un brouillard inquiétant, alimenté par un silence prolongé, des témoignages préoccupants et un développement apparemment chaotique.

Le projet conserve malgré tout un potentiel immense. L’univers et les mécaniques annoncés font encore rêver les amateurs de jeux narratifs et de FPS à forte identité. Mais l’absence totale de communication et les coulisses tourmentées du studio risquent de peser lourd sur la réception du jeu, quelle que soit sa qualité finale.

Il est désormais crucial que Ghost Story Games sorte du silence. Les joueurs n’attendent pas forcément un chef-d'œuvre: ils veulent des nouvelles, un signe de vie, une preuve que Judas n’est pas qu’un mirage créatif. En attendant, le jeu continue de fasciner… par son absence autant que par ses promesses.

Partager sur Facebook Partager sur Facebook Partager sur Twitter Partager sur Twitter Partager sur Linkedin Partager sur Linkedin Partager sur WhatsApp Partager sur WhatsApp

Articles similaires

Hideo Kojima a laissé une clé USB remplie d'idées pour après sa mort Nouvelles de l'industrie

16/05/2025

Hideo Kojima a laissé une clé USB remplie d'idées pour après sa mort

Hideo Kojima a confié une clé USB à son assistant contenant toutes ses idées pour guider Kojima Productions après sa mort.

En voir plus
Future Games Show 2025: rendez-vous le 7 juin pour plus de 40 jeux dévoilés Événements et conventions

16/05/2025

Future Games Show 2025: rendez-vous le 7 juin pour plus de 40 jeux dévoilés

Le Future Games Show: Summer Showcase 2025 sera diffusé le 7 juin avec plus de 40 jeux présentés et un duo d’hôtes prestigieux.

En voir plus
Charles Guillemot de retour chez Ubisoft: controverses et ambitions stratégiques Business

16/05/2025

Charles Guillemot de retour chez Ubisoft: controverses et ambitions stratégiques

Charles Guillemot revient chez Ubisoft pour co-diriger le Comité de Transformation. Un retour qui divise et soulève des questions internes.

En voir plus