
Marathon, le prochain titre très attendu de Bungie, devait être l’occasion pour le studio de renouer avec son héritage de science-fiction. Cependant, au lieu de faire parler de lui pour son gameplay ou ses mécaniques innovantes, le jeu est aujourd’hui au cœur d’une polémique qui secoue l’industrie du jeu vidéo. En cause: une affaire de plagiat graphique ayant contraint Bungie à suspendre toute présentation visuelle de son projet.
Ce vendredi, lors de son livestream hebdomadaire consacré à Marathon, Bungie a surpris ses fans en ne montrant aucune séquence de gameplay. Cette absence n’était pas due à un manque de contenu, mais bien à une volonté de transparence face à une crise interne. La designer indépendante Fern Hook a accusé le studio d’avoir utilisé, sans autorisation, plusieurs de ses créations dans le développement du jeu.
Ce geste inhabituel, accompagné d’excuses publiques et de promesses de réforme, marque un tournant pour Bungie. Le studio, autrefois considéré comme l’un des plus respectés du milieu, se retrouve aujourd’hui à devoir restaurer sa crédibilité, aussi bien auprès des artistes que des joueurs. L’affaire soulève des questions sur la rigueur des processus internes de création, et sur la responsabilité éthique des géants du jeu vidéo.
Bungie dans la tourmente: l'affaire des artworks plagiés
Les accusations de Fern Hook
Tout a commencé lorsqu’une artiste indépendante, Fern Hook, a remarqué des similitudes troublantes entre ses créations graphiques et certains éléments visuels apparaissant dans Marathon. Ces éléments – icônes, textes et motifs – figuraient sur une feuille de décalcomanies utilisée dès la phase de préproduction du jeu, datant de 2020. Selon ses déclarations, Bungie aurait exploité ces assets sans son autorisation, ni même la citer comme source.
L'accusation n'a pas tardé à faire le tour des réseaux sociaux, déclenchant une vague de critiques à l'encontre du studio. Fern Hook, très active dans la communauté artistique numérique, a fourni des preuves visuelles convaincantes de la ressemblance, provoquant une remise en question immédiate de la légitimité de certaines images de Marathon.
"Il n’y a rien de plus décourageant que de voir son travail réutilisé par un studio mondialement connu sans avoir été consultée ni créditée", a déclaré Fern Hook sur X (anciennement Twitter).
La réponse officielle de Bungie
Face à la gravité des accusations et à leur écho médiatique, Bungie a rapidement réagi. Joseph Cross, directeur artistique de Marathon, a pris la parole pour expliquer la situation et présenter des excuses formelles. Il a admis que ces artworks avaient été intégrés au projet par un artiste ayant travaillé sur les premières étapes de la préproduction. Selon lui, ce dernier aurait incorporé ces éléments sans autorisation, agissant seul et sans validation de l’équipe artistique principale.
"Il n'y a absolument aucune excuse pour cet oubli, et nous nous engageons à mettre en place un processus de révision plus rigoureux", a-t-il affirmé durant le livestream.
Cross a également contacté personnellement Fern Hook pour lui présenter ses excuses et l’assurer que les contenus illicites seraient retirés de la version alpha de Marathon. Le studio s’est engagé à revoir l’ensemble de ses assets pour s’assurer qu’aucun autre contenu non autorisé n’a été utilisé.
Un livestream sans gameplay: une décision stratégique
Le choix de la transparence
Ce vendredi, les spectateurs du livestream hebdomadaire de Marathon s’attendaient à découvrir de nouveaux extraits de gameplay. À la place, Bungie a pris une décision radicale: ne rien montrer. Ce silence visuel, inhabituel pour une communication marketing, a été justifié en direct. Le studio a expliqué qu’il préfère suspendre la présentation de toute séquence tant que l'enquête interne sur les contenus plagiés n’est pas achevée.
Ce choix s’inscrit dans une volonté affichée de transparence et d’intégrité. Bungie cherche à montrer qu’il prend les accusations au sérieux et qu’il ne souhaite pas promouvoir un produit contenant, même partiellement, du contenu volé. En mettant sur pause sa communication visuelle, le studio tente de regagner la confiance de son public et de l'industrie.
"Nous ne voulons pas promouvoir un contenu entaché d’erreurs. C’est notre responsabilité de faire mieux", a déclaré un représentant du studio pendant le live.
L'impact sur la communauté
Du côté des fans, la décision a été reçue avec un mélange de compréhension et de frustration. Si certains saluent le choix éthique du studio, d’autres s’inquiètent de l’avenir du projet. Marathon suscite beaucoup d’attentes, et l’absence prolongée de gameplay alimente l'incertitude.
Sur les réseaux sociaux et forums spécialisés, les discussions vont bon train: certains demandent plus de clarté sur l'étendue du problème, tandis que d'autres expriment des craintes sur l’état réel du développement. Cette mise en retrait soudaine donne aussi matière à spéculation: le projet est-il en difficulté ? Faut-il craindre un report ou une refonte majeure du design visuel ?
Ce qui est certain, c’est que Bungie joue une partie serrée. La communication autour de Marathon devra désormais être irréprochable pour effacer le doute et relancer l’enthousiasme.
Une morale en chute libre chez Bungie
L’affaire a ravivé un débat plus large: celui de l’éthique dans les studios de développement. Bungie, longtemps perçu comme un pilier de professionnalisme depuis ses années glorieuses avec Halo, se retrouve aujourd’hui en pleine tempête morale. Le plagiat graphique, même s’il est attribué à un individu isolé, révèle une faille profonde dans les processus de validation et de supervision artistique.
Le fait qu’un élément aussi fondamental qu’une feuille de décalcomanies ait été approuvé sans vérification pose des questions alarmantes sur le workflow créatif en interne. Cela soulève aussi la question de savoir si Bungie, dans sa croissance rapide et son intégration à Sony, n’a pas négligé certains fondamentaux de contrôle qualité.
"Il ne suffit pas de s’excuser: il faut remettre en question toute la chaîne de création et de validation pour éviter d’autres abus", commentait un ancien développeur sur LinkedIn.
La confiance des joueurs ébranlée
Pour les joueurs, cette affaire n’est pas anodine. Elle touche à la confiance — un élément précieux dans la relation entre un studio et sa communauté. De nombreux fans, fidèles depuis l’ère Destiny, se disent déçus, voire trahis. D’autres, plus modérés, attendent de voir si Bungie tiendra ses engagements de réforme.
Ce scandale tombe également à un moment critique: l’industrie est en pleine mutation, avec une exigence croissante de transparence, de respect des artistes indépendants et de bonnes pratiques. À une époque où les joueurs scrutent les moindres faits et gestes des studios, l’affaire Marathon pourrait rester comme un cas d’école, illustrant les dangers d’un système trop permissif.
La marque Bungie, jusque-là synonyme de qualité AAA, devra maintenant prouver qu’elle peut aussi incarner l’intégrité.
Enjeux pour la sortie de Marathon
Un calendrier de sortie compromis ?
Jusqu’ici, Marathon bénéficiait d’une anticipation grandissante. Annoncé comme un shooter de science-fiction à extraction, à mi-chemin entre Escape from Tarkov et Destiny, le jeu ambitionnait de séduire à la fois les nostalgiques de la franchise d'origine et les amateurs de gameplay compétitif. Mais cette controverse bouleverse l’agenda.
Si Bungie ne l’a pas encore officialisé, les rumeurs d’un report commencent à circuler. Entre la révision complète des assets incriminés, la nécessité de revoir les processus de validation artistique, et une communication désormais sur la défensive, il paraît peu probable que Marathon sorte à la date initialement prévue. Le studio va devoir jongler entre réparation et création, tout en maintenant l’intérêt du public pour son projet.
Ce n’est pas la première fois qu’un jeu triple A voit sa feuille de route chamboulée par un scandale, mais dans un contexte de concurrence féroce, chaque mois de retard compte.
Les mesures prises pour éviter de futurs incidents
Pour limiter les dégâts et surtout prévenir toute récidive, Bungie affirme avoir lancé une série de réformes internes. Parmi elles: un audit complet de tous les éléments visuels de Marathon, l’instauration de nouvelles étapes de validation juridique pour les créations artistiques, et une formation des équipes sur le respect des droits d’auteur.
Joseph Cross a promis une "tolérance zéro" pour toute forme d’appropriation non autorisée à l’avenir, et s’est engagé personnellement à revoir les standards de qualité. Des procédures de revue croisée entre artistes, juristes et producteurs devraient désormais s’appliquer à toutes les étapes de production.
Ces mesures, si elles sont réellement mises en œuvre, pourraient repositionner Bungie comme un acteur responsable, capable d’apprendre de ses erreurs. Mais elles devront être accompagnées d’actions concrètes visibles et mesurables, car les mots seuls ne suffisent plus à calmer les critiques.
En quelques mots
L’affaire du plagiat dans Marathon n’est pas qu’un simple faux pas artistique: c’est une alerte rouge pour Bungie, et plus largement pour l’industrie vidéoludique. Dans un écosystème où la propriété intellectuelle est une ressource aussi précieuse que le code ou le gameplay, ce type d’erreur ne peut plus être toléré. Le choix du silence visuel lors du dernier livestream est un signal fort, mais il ne suffira pas à restaurer la confiance des joueurs et des artistes lésés.
Marathon devra désormais porter non seulement les ambitions ludiques d’un grand retour de Bungie à la science-fiction compétitive, mais aussi le poids d’un engagement éthique renouvelé. Si le studio parvient à transformer cette crise en opportunité de réforme, il pourrait en ressortir grandi. Dans le cas contraire, Marathon risque de devenir un exemple malheureux de ce qu’il ne faut pas faire.