OD de Kojima: un projet d’horreur aussi ambitieux qu’incertain

AutorArtículo escrito por Vivien Reumont
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Fecha de publicación09/12/2025

Depuis son annonce officielle, OD (Overdose ?) intrigue, déroute et fascine. Développé par Kojima Productions en partenariat avec Xbox Game Studios, le jeu est présenté comme une œuvre d’horreur radicalement différente de ce que Hideo Kojima a pu proposer auparavant. Contrairement à Death Stranding, qui s'appuyait sur des mécaniques et une direction artistiques familières aux fans du créateur japonais, OD ambitionne de briser tous les cadres.

Mais derrière cette ambition démesurée se cache une réalité plus incertaine. À l’occasion d’une interview accordée au média Ananweb, Kojima a confié ses doutes quant à la faisabilité même du projet. Il va jusqu’à admettre qu’il n’est « pas sûr que le jeu aboutisse un jour ». Une déclaration rare, presque inquiétante, pour un projet de cette envergure.

Et pourtant, OD alimente les théories les plus folles. Une première bande-annonce dévoilée en septembre dernier, sans gameplay mais truffée d’indices cachés selon le créateur, a suffi à raviver la flamme de la curiosité chez les fans. Mais au-delà du mystère, de nombreuses zones d’ombre persistent : aucune date de sortie, aucun aperçu concret des mécaniques de jeu, et un positionnement risqué autour du modèle live service, encore inédit pour Kojima.

Alors que veut vraiment dire cette déclaration de doute ? S’agit-il d’une stratégie de communication savamment orchestrée, ou des prémices d’un projet qui pourrait rejoindre la longue liste des jeux avortés ? Décryptons ensemble ce que l’on sait – et surtout ce que l’on ne sait pas – autour de OD.

 

Un projet ambitieux… mais extrêmement flou

Un genre et un style hors des sentiers battus

Depuis ses débuts, Hideo Kojima a toujours cultivé une approche singulière du jeu vidéo, mêlant narration cinématographique, gameplay atypique et expérimentations formelles. Mais avec OD, il semble vouloir pousser les limites encore plus loin. L'ambition affichée est de créer une expérience d’horreur interactive jamais vue, structurée autour d’un modèle live service, ce qui est une première pour son studio.

Contrairement aux jeux à la structure linéaire auxquels Kojima nous avait habitués, OD s'oriente vers une expérience évolutive, potentiellement connectée en permanence, et nourrie par des événements récurrents, des mises à jour de contenu, voire une interaction directe avec la communauté. Cela tranche radicalement avec Death Stranding ou Metal Gear, et complexifie grandement sa conception.

Le genre même du jeu est encore difficile à définir. S’il s’agit bien d’un titre d’horreur, Kojima l’évoque comme une œuvre « totalement nouvelle » — ni un simple survival horror ni un thriller psychologique classique. Le flou autour de la classification du jeu participe à son aura mystérieuse... mais aussi à la prudence des observateurs.

Un trailer mystérieux — beaucoup d’indices, peu de certitudes

En septembre, OD s’est dévoilé à travers un trailer aussi captivant qu’opaque. Peu de choses concrètes à se mettre sous la dent : aucun gameplay, aucun contexte narratif clair. On y voit des visages hyperréalistes, dont celui de Sophia Lillis, actrice de la série It, plongés dans des dialogues énigmatiques, dans une ambiance dérangeante.

Ce teaser, pensé comme une énigme à part entière, a été conçu pour alimenter la curiosité. Kojima affirme y avoir dissimulé des indices que seuls les joueurs les plus attentifs pourraient décrypter. Une approche qui rappelle les campagnes virales qu’il avait orchestrées pour Metal Gear Solid V, ou le faux studio 7780s pour P.T., le teaser de Silent Hills.

Mais l’effet double tranchant est bien réel : si la stratégie intrigue, elle laisse aussi beaucoup d’inconnues. L’absence de gameplay ou de description précise du concept peut freiner l’adhésion d’une partie du public et poser question sur l’état d’avancement réel du développement.

 

Pourquoi Hideo Kojima n’est même pas certain que OD aboutisse

Réinventer le « live service » depuis le début — un pari risqué

Lors de son entretien avec Ananweb, Hideo Kojima a fait une déclaration inhabituelle pour un créateur de son calibre : « Je ne sais pas si ce jeu pourra être mené à son terme ». Une phrase qui témoigne de la complexité technique et conceptuelle du projet OD, mais aussi d’un niveau de prise de risque rarement atteint dans l’industrie.

Le cœur du problème semble être l’ambition de concevoir un jeu entièrement bâti autour du modèle live service, mais sans reprendre les codes habituels de ce format. Kojima veut inventer une nouvelle forme de narration évolutive, une manière de faire vivre la peur et la tension au fil du temps, avec des événements dynamiques, des interactions imprévisibles et une implication communautaire profonde. Rien à voir avec un simple système de saisons ou de microtransactions.

Or, concevoir un tel système à partir de zéro implique des défis de taille : serveurs, infrastructures, mise à jour de contenu régulier, sécurité, mais aussi engagement du public dans le temps. C’est un modèle qui demande des ressources colossales et une coordination sans faille entre les équipes techniques, artistiques et marketing.

Kojima Productions, bien que soutenu par Xbox, n’est pas un studio AAA géant. Et si le concept ne tient pas ses promesses ou ne trouve pas son public, l’investissement pourrait vite devenir un gouffre.

Des contraintes techniques et organisationnelles importantes

Le flou technique autour d’OD n’est pas simplement une question de communication. Selon plusieurs sources proches du projet, le développement est extrêmement expérimental, reposant sur des technologies avancées (comme le cloud gaming, la reconnaissance faciale et l’intelligence artificielle pour certains éléments narratifs).

Ajoutons à cela le fait que Kojima Productions travaille sur plusieurs projets en parallèle, notamment Death Stranding 2 pour PlayStation, et que le studio reste relativement restreint en taille. Il est donc probable que les ressources allouées à OD soient limitées ou étalées dans le temps.

Enfin, bien que le partenariat avec Xbox garantisse une certaine stabilité financière, il impose aussi des exigences de performance et des attentes en matière de résultats commerciaux. L’incertitude exprimée par Kojima pourrait aussi refléter une tension entre la vision artistique du studio et la réalité du développement à grande échelle sur un support live.

 

Ce qu’on sait — et ce qu’on ignore encore — sur OD

Ce qui a été dévoilé (partenariat, moteur, teaser, contexte)

Malgré l’opacité qui entoure OD, plusieurs éléments ont été confirmés. Le projet est né d’un partenariat stratégique entre Kojima Productions et Xbox Game Studios, un accord annoncé comme « inédit » lors du Xbox & Bethesda Showcase 2022. Microsoft fournit ici l’infrastructure technique, notamment à travers le cloud Azure, ce qui renforce l’idée d’un jeu massivement connecté et dynamique.

Le jeu est conçu comme une expérience d’horreur psychologique, et devrait utiliser des technologies de pointe pour intensifier l’immersion. Selon plusieurs indices, le moteur Unreal Engine 5 serait utilisé, bien qu’aucune confirmation officielle n’ait été donnée — un choix logique pour un jeu aux ambitions visuelles et interactives très élevées.

Le teaser de septembre 2024, malgré son absence de gameplay, a dévoilé quelques visages clés : Sophia Lillis, Udo Kier et Hunter Schafer y apparaissent, suggérant une narration cinématographique et peut-être une approche proche de la performance capture intégrale.

Enfin, Kojima a clairement indiqué que la bande-annonce contient des pistes et secrets cachés, appelant les fans à enquêter. Une mécanique qu’il affectionne particulièrement et qui participe à renforcer le culte du mystère autour du jeu.

Ce qui reste dans l’ombre (gameplay réel, date de sortie, ambition narrative)

Le plus frustrant avec OD, c’est tout ce qu’on ne sait toujours pas. Aucun gameplay n’a été présenté à ce jour, ce qui soulève la question : le jeu existe-t-il vraiment en état jouable, ou n’est-on encore qu’en phase de prototype ?

Aucune fenêtre de sortie n’a été communiquée. Pas même une estimation vague. Cela peut indiquer soit un choix de discrétion stratégique, soit un état de développement trop embryonnaire pour envisager une planification concrète. De nombreux fans s’inquiètent déjà d’une possible annulation, à l’instar de Silent Hills en 2015.

Sur le fond, le scénario et l’univers du jeu sont totalement inconnus. Kojima, grand adepte de la narration complexe et des métaphores sociales, a peut-être ici l’intention de traiter des thématiques nouvelles : l’aliénation numérique ? la surveillance permanente ? le rapport entre joueurs et créateurs ? Difficile de spéculer sans éléments tangibles.

Enfin, le positionnement sur le marché reste trouble. OD est-il un jeu uniquement solo ? Intègre-t-il du multijoueur asynchrone, comme Death Stranding ? Ou un système communautaire en ligne similaire à des expériences live comme Fortnite, mais dans un genre horrifique ? Toutes ces questions restent sans réponse.

 

Que pourrait vouloir dire ce projet pour l’avenir du jeu d’horreur (et des jeux à service) ?

Si OD réussit — redéfinir les codes de l’horreur interactive

Si OD parvient à concrétiser les ambitions de Hideo Kojima, il pourrait bien devenir un tournant majeur dans l’histoire du jeu vidéo d’horreur. En combinant une expérience immersive, évolutive et communautaire, OD pourrait redéfinir la manière dont la peur est vécue en jeu : plus seulement à travers une histoire linéaire, mais via une série d’événements, de réactions imprévisibles et de mécaniques qui s’adaptent aux joueurs en temps réel.

On peut imaginer des scénarios qui changent chaque semaine, des phénomènes surnaturels partagés en ligne entre joueurs, des mises à jour surprise qui modifient les règles du jeu sans prévenir… Kojima pourrait donner naissance à un nouveau genre : l’horreur persistante. Un modèle où la narration et la peur ne s’arrêtent jamais, et où les frontières entre fiction et réalité deviennent floues.

Un succès ouvrirait alors la voie à d'autres créateurs pour expérimenter davantage avec le format live service, en dehors des classiques battle royale ou MMO. Cela pourrait aussi encourager des investissements dans des expériences interactives plus artistiques et audacieuses, dans un secteur souvent dominé par des mécaniques de rentabilité.

Si OD échoue — les risques d’un modèle trop audacieux

Mais si OD échoue — soit en ne sortant jamais, soit en se révélant décevant ou incompris — les conséquences pourraient être lourdes, autant pour Kojima Productions que pour l’avenir de ce type d’initiatives. L’échec d’un jeu aussi risqué pourrait refroidir les éditeurs quant au soutien de projets expérimentaux. Cela rappellerait tristement le destin de Silent Hills, tué dans l'œuf malgré une hype énorme.

Le public pourrait aussi se montrer méfiant face à d'autres jeux d'horreur live service à l’avenir, surtout si OD tombe dans les travers du modèle : contenus trop dilués, pression sur la monétisation, ou expérience trop dépendante de serveurs actifs.

Enfin, pour Kojima lui-même, un tel revers serait un rappel que même les plus grands créateurs peuvent se heurter aux limites du format, surtout quand la vision artistique s’oppose aux réalités économiques et techniques du marché.

 

Réactions & attentes de la communauté et des fans

Enthousiasme, scepticisme, prudence

Dès l’annonce de OD, les réactions des joueurs n’ont pas tardé à envahir les forums, les réseaux sociaux et les chaînes YouTube. La signature Hideo Kojima suffit à elle seule à déclencher un mélange d’excitation et de mystère. Beaucoup espèrent une œuvre révolutionnaire à l’image de P.T., encore adulé aujourd’hui comme l’une des expériences d’horreur les plus marquantes du média.

Cependant, cet enthousiasme est tempéré par un certain scepticisme. L'absence totale de gameplay, les déclarations de Kojima sur l'incertitude du projet et le format live service suscitent des inquiétudes légitimes. De nombreux joueurs craignent une expérience trop éclatée dans le temps, trop dépendante des mises à jour et difficile à suivre, surtout si le contenu n'est pas à la hauteur des attentes.

Sur Reddit ou Twitter, les discussions sont passionnées mais divisées. Certains y voient un projet visionnaire, d'autres un « chaos créatif » potentiellement ingérable. Le fait que le jeu soit soutenu par Xbox soulève aussi des interrogations sur son accessibilité : sera-t-il exclusif ? Jouable uniquement en ligne ? Intégré au Game Pass dès sa sortie ?

L’espoir d’un « jeu mythique » — ou la crainte d’une annulation

Dans la mémoire collective des joueurs, le nom de Kojima reste indissociable d’expériences marquantes. C’est pourquoi, même dans l’incertitude, l’espoir persiste : celui de voir OD devenir un jeu mythique, marquant une génération comme Metal Gear Solid ou Death Stranding avant lui.

Certains fans scrutent chaque mot de Kojima sur les réseaux, analysent la bande-annonce image par image, théorisent sur les mécaniques possibles. Il se crée déjà une mythologie autour du jeu, comme si OD existait déjà dans les esprits, même sans version jouable.

Mais à l’opposé, l’ombre de l’annulation plane. Kojima a lui-même admis que le projet pourrait ne pas se concrétiser. Et dans une industrie où les coûts de développement explosent, même les créateurs les plus respectés ne sont pas à l’abri d’un stop and go brutal, surtout si le concept ne convainc pas en interne.

« C’est une idée qui me tient à cœur, mais je ne sais pas si je pourrais aller jusqu’au bout », confie Kojima. Une phrase à la fois pleine de passion et de doute, qui cristallise les sentiments d’une communauté prise entre deux extrêmes : l’exaltation et la peur.

 


En quelques mots

OD est bien plus qu’un simple jeu en développement : c’est une énigme vivante, un pari artistique, une promesse de réinvention du genre horrifique et du jeu vidéo connecté. Hideo Kojima, fidèle à lui-même, joue avec les attentes, les certitudes et les nerfs de ses fans, en construisant une œuvre aussi intrigante qu'incertaine.

Mais derrière cette ambition se cache un projet fragile, complexe, et risqué. Le format live service, encore vierge de l’empreinte de Kojima, pourrait aussi bien révolutionner le jeu d’horreur qu’en briser les fondations. L’absence de gameplay, les contraintes techniques et l’incertitude publique du créateur nourrissent autant l’impatience que l’angoisse.

Qu’il devienne une œuvre culte ou un rêve avorté, OD s’inscrit déjà dans une lignée de jeux qui font parler bien avant même leur naissance. Et dans un marché saturé d’annonces formatées, ce simple fait mérite déjà d’être salué.

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